Cet article est une réponse à « L’usage
du référendum : La démocratie périmée de Nicolas Sarkozy »
de Dominique Bertinotti. Je ne m’étends pas sur Sarkozy (voir ici et là),
mais plutôt sur les limites de cette « démocratie » participative. Je
souhaiterais que le camp de Ségolène Royal prenne franchement parti pour la
démocratie, c’est-à-dire pour la démocratie semi-directe.
Qui
décide ?
Madame Bertinotti dit : « Associant étroitement les citoyens aux
décisions prises par les élus, cette méthode de gestion des affaires de la cité
concilie démocratie directe et démocratie représentative ».
Que signifie « associer » ? Qui prend finalement les
décisions ? Dans une démocratie, le pouvoir (kratos) appartient au peuple
(dêmos). Le peuple n’a pas le temps de prendre toutes les décisions, c’est
pourquoi il désigne des représentants. Mais dans une véritable démocratie, ces
représentants ne peuvent pas confisquer le pouvoir. Le référendum est
obligatoire sur les sujets les plus importants. Et le référendum doit aussi
obligatoirement être organisé si le nombre requis de citoyens le demandent dans
les délais impartis. Ils peuvent s’opposer à une décision, ou soumettre en
votation une nouvelle proposition. C’est la démocratie semi-directe. Cela
fonctionne en Suisse (voir ici les
sujets sur lesquels les Suisses décideront lors de la prochaine votation).
Si
le peuple peut décider, il sera aussi consulté lors de l’élaboration des
projets
Bertinotti dit : « Rien ne serait pire que de réduire le débat
au clivage binaire du oui contre le non ». Or, le régime
actuel où le peuple n’a aucun pouvoir de décision entre deux élections est
pire. A la fin, c’est toujours une décision binaire entre un oui et un non.
Il est bien sûr souhaitable que le peuple puisse
intervenir déjà en amont lors de l’élaboration des projets. Dans une véritable
démocratie, cette intervention en amont complète le pouvoir de décision finale,
mais ne le remplace pas. Quand le peuple
conserve le pouvoir de décider, les élus soumettent spontanément leurs idées à
une large consultation auprès de tous les milieux intéressés (partis,
associations, etc….) pour éviter que des citoyens lancent et gagnent un
référendum (voir en Suisse). De plus, grâce au référendum d’initiative
populaire, les citoyens peuvent formuler eux-mêmes une proposition qui sera
soumise en votation populaire. La démocratie semi-directe (ou le peuple décide
par oui ou non) engendre donc naturellement une démocratie participative (ou
les milieux intéressés sont consultés lors de l’élaboration des projets).
L’inverse n’est pas nécessairement vrai : une démocratie participative
peut laisser les citoyens s’exprimer sans jamais leur accorder le pouvoir de
décider. Dans ce cas, ce n’est même pas une véritable démocratie puisque le
peuple n’a pas le pouvoir.
La
peur des clivages
Tant qu’il n’y a pas unanimité, toute question génère des
clivages entre ceux qui adhèrent à des réponses différentes. Les élections creusent
toujours le même clivage gauche/droite. De plus, une fois le président élu, se
creusera durant tout son mandat, et pour toutes ses décisions, le clivage entre
ses partisans et ses adversaires. Les référendums n’éliment pas les inévitables
clivages, mais leur laisse leur diversité naturelle. En effet, s’il y a
suffisamment de votations sur différents sujets, le clivage n’est pas toujours
le même : tantôt gauche/droite, tantôt ville/campagne, tantôt
jeunes/vieux, etc… Il est inévitable que le peuple soit divisé lorsqu’il s’agit
de prendre une décision, mais il n’est pas nécessaire que ce clivage soit
artificiellement forcé de couper la France toujours au même endroit.
Bertinotti adhère
à la thèse suivante : « un pouvoir
n’est désormais considéré comme pleinement démocratique que lorsqu’il est soumis à des épreuves de contrôle et de
validation à la fois concurrentes et complémentaires de l’expression majoritaire ». Bertinotti estime donc qu’il ne faut pas
toujours respecter la volonté de la majorité. Mais qui se place alors au-dessus
de la majorité pour décréter que son propre choix doit primer ? Un
élu ? Les élus sont-ils si parfaits ? N’ont-ils pas des intérêts
particuliers ? Et si l’on estime que le peuple est apte à choisir ses
élus, alors on doit croire qu’il est aussi apte à décider sur des sujets, car
il est plus facile de décider sur un sujet que de choisir un candidat qu’on
connaît mal et dont il est difficile de juger le caractère (voir DSK), et dont
le programme comporte de nombreux points (alors qu’une votation sur un sujet ne
porte que sur ce point). Le peuple n’a certes pas toujours raison, mais il a la
légitimité démocratique. Dans une démocratie, seul le peuple dispose de la
souveraineté. Il ne peut pas être question de ce que Bertinotti appelle la « souveraineté
partagée ».
Le
peuple refusera toute tutelle
Le peuple exige d'être traité en adulte : il
refusera toute tutelle camouflée, comme il refusera la tutelle actuelle. Le
peuple prendra le pouvoir en imposant à ses élus la démocratie semi-directe. Il
ne faut voter que pour des candidats qui s’engagent à introduire la démocratie
semi-directe (voir ici). Pour
en savoir davantage, lire ici.
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